NE T’INQUIÈTE PAS CHÉRIE

4 octobre 2022

Les critiques de ce film ont souvent été sévères, mais plusieurs critiques de film de premier plan semblent en désaccord et considèrent le film comme révélateur. Le film peut apparaître superficiel dans un premier temps, mais il s’attaque à plusieurs thèmes sociaux pertinents. On va continuer à parler de ce film jusqu’à la période des Oscars, avec raison.

Ne t’inquiète pas chérie : un film américain de 2022, de la cinéaste Olivia Wilde, qui fait aussi partie de la distribution, présenté au Festival de film de Venise en tant que film prestige et candidat aux Oscars pour les films de 2022.

L’HISTOIRE

Le film raconte la vie d’un jeune couple, Alice et Jack, qui vivent dans un projet domiciliaire, Victory, où les hommes travaillent tous pour la seule compagnie du lieu, en partant tous les matins, à la même heure, dans leurs voitures colorées des années 1950, alors que les femmes s’occupent des tâches domestiques, tout en se rendant souvent à des cours de ballet et à la piscine pour se baigner et prendre un verre.

La communauté est dirigée par un certain Frank, craint et respecté, moitié motivateur, moitié prêcheur, dont le mot d’ordre est que « l’ennemi du progrès, c’est le chaos ».

Peu à peu, Alice découvre par ailleurs un côté sombre à cette communauté, car les femmes qui remettent en question ce genre de vie sont droguées et forcées de retrouver le droit chemin, pour réintégrer le rôle qui leur était assigné lors de leur adhésion du départ.

Il y a une scène intrigante dans la deuxième moitié du film, dans laquelle Alice et Jack vivent une vie complètement différente, avec Alice qui y est une femme épuisée au retour de son travail de chirurgienne, dans le cadre d’une grande ville plutôt sale et potentiellement violente. Dans cette scène intrigante, Alice et Jack se branchent à des appareils de réalité virtuelle, en lassant le spectateur se demander si le film ne raconte qu’une simple expérience virtuelle ou si la scène ne représente que leur vie avant leur nouvelle vie dans Victory.

QUELQUES INTERPRÉATIONS ET COMMENTAIRES

En offrant un résumé des commentaires et des critiques sur le film, le site Rotten Tomatoes a décrit le film comme étant une sorte de mélange quelque peu usé de thèmes déjà connus. Par ailleurs, Max Weiss du Baltimore Magazine, tout en reconnaissant cette dernière critique, remarque que le thème de l’inégalité des genres, quant à lui, mérite tout de même que l’on continue de s’y attarder. Weiss conclut que, de toute façon, les critiques ont été trop sévères pour ce film.

Elamin Abdelmahmoud, critique de premier plan du BuzzFeed News, quant à lui, reconnaît que le film s’adresse à trop de thèmes en même temps, mais « qu’il y a quelque chose là (dans ce film) », en le comparant même au film Get Out, encensé par la critique, « en poussant des maux de la société jusqu’à leur limite métaphorique, en les transformant en histoire d’horreur ».

Charlotte O’Sullivan, du London Evening Standard, compare, elle aussi, le film à Get Out, et propose que l’on abandonne le group think autour de ce film, en suggérant qu’Olivia Wilde a quelque chose d’un génie incompris, et que son film est peut-être bien le meilleur film de l’année.

L’ANALYSE DES FILMS SUR LE DIVAN

Revenons à cette remarque du critique du BuzzFeed News qui a dit que le film s’attaquait à trop d’idées en même temps, ce qui est en effet l’impression donnée par l’histoire.

Tout en reconnaissant le bien fondé de cette première impression, allons un peu plus loin et disons que les réalités qu’aborde ce film représentent toutes des réalités de notre vie sociale : la vie de banlieue, le rôle des femmes, les quartiers « protégés », la loi et l’ordre, la ferveur quasi religieuse, la politique, le pouvoir et la réalité virtuelle. Ces thèmes semblent se renvoyer l’un à l’autre, et être simultanément présents, en interaction, pour ainsi dire.

Tentons d’en comprendre mieux les éléments principaux.

Commençons par la vie de banlieue et sa relation avec le féminisme et le rôle des femmes, dans le sens que le mode de vie de la banlieue a eu tendance, historiquement et à son apogée, à contraindre les femmes dans un rôle limité et secondaire. Dans le film, la vie de banlieue semble être associée à la loi et l’ordre (« le pire ennemi du progrès est le chaos »), et d’une certaine façon à la religion, à cause de la ferveur quasi religieuses des exhortations du leader de la communauté, une sorte de guru. Bien sûr, on peut facilement imaginer que les membres de la communauté votent pour des partis conservateurs, ce qui nous ramène à une réalité incontournable, soit la politique.

Le dernier élément qui est interrelié aux autres dans le film est celui de la réalité virtuelle, lequel est seulement suggéré dans le film. La réalité virtuelle, comme les autres dimensions des nouveaux moyens de communication, nous permet d’imaginer un autre monde, différent de celui que nous connaissons, son envers, tiré d’un passé pas trop lointain.

Il est vrai que ce film traite de beaucoup de sujets en même temps, ce qui est une faiblesse pour certains. Mais c’est aussi sa force.